Florence Knoll-Bassett, cette visionnaire
Née en 1917 à Saginaw, Michigan (USA), Florence Schust grandit auprès de parents d’origine allemande et canadienne. Ceux-ci disparaissent tragiquement, la laissant orpheline à l’âge de 12 ans. Florence suit la fin de sa scolarité obligatoire à l’internat pour filles de Kingswood, fondé par Eliel Saarinen, architecte finnois.
Prise sous l’aile protectrice de la famille Saarinen, dont le fils Eero, futur architecte et designer renommé, deviendra un ami très proche, elle passe régulièrement les vacances scolaires avec eux en Finlande et rencontre l’architecte Alvar Aalto, qui l’encourage lui aussi à poursuivre des études d’architecture à la Cranbrook Academy.
Des rencontres déterminantes …
Dès la fin des années 30, elle suit sa formation en urbanisme à l’école d’Architecture de l’Université Columbia (NYC), avec pour professeur, entre autres, Charles Eames. Puis elle passe un an à l’Architectural Association de Londres où elle découvre le style international de Le Corbusier. Elle quitte l’Angleterre au début de la Deuxième Guerre Mondiale pour les Etats-Unis.
En 1940, Florence Schust est à Cambridge (Massachusetts) et travaille brièvement avec les modernistes américains Wallace K. Harrison, Walter Gropius et Marcel Breuer. Désireuse de parfaire sa formation, elle s’inscrit à l’Armour Institute (aujourd’hui, Illinois Institute of Technology) et suit les cours de Ludwig Mies van der Rohe qui aura un effet marquant sur son approche du design, surtout en termes de clarté, de rigueur et de méthode.
En 1941, l’architecte de 24 ans déménage à New-York où elle travaille pour Harrison & Abramovitz, une entreprise de design d’intérieur. C’est là qu’elle rencontre Hans Knoll, qui vient de créer sa compagnie de mobilier aux Etats-Unis après avoir quitté Londres en 1938.
Issu d’une famille de fabricants de meubles depuis trois générations basée à Stuttgart en Allemagne, il souhaite apporter le style moderniste européen vers une nouvelle clientèle américaine.
Florence Schust, architecte d’intérieur novatrice
Florence S. va tenir un rôle significatif comme designer dans le développement esthétique de la firme Knoll.
Le boom économique de l’après-guerre lui permet d’abord de rajeunir la conception des espaces de travail pour la clientèle de la compagnie. Première architecte d’intérieur à ne pas se concentrer uniquement sur la décoration, elle pense l’aménagement d’intérieur de manière globale, en fonction de la culture d’entreprise et des besoins de ses clients.
Elle introduit le concept modulaire, avec des bureaux ouverts, des cloisons légères et des portes coulissantes, des armoires suspendues et des couleurs stimulantes, vibrantes et primaires. Elle met l’accent sur le confort en utilisant des textiles, le mélange de matériaux (bois, stratifié et métaux, verre) et propose de nouvelles formes, avec notamment des tables de conférence ovales pour une meilleure communication d’entreprise.
Florence S. transmet ses propositions à ses clients au travers de collages qu’elle appelle « paste up ». Sur les plans, elle attache des échantillons de matières et textures (bois, tissus) afin de donner une compréhension plus parlante qu’une esquisse en deux dimensions; cette méthode de communication, accompagnée de notes détaillées, devient essentielle pour convaincre les clients et les amener à accepter cette modernité.
C’est à elle que l’on doit le concept d’architecture d’intérieur par opposition à celui de décoration. Avec un minimalisme chaleureux, humanisé et une conception rationaliste, elle amène de la cohérence dans la fonctionnalité.
Florence Knoll, designer d’espaces et de mobilier
Écoutant son intuition, elle pense également que des architectes et des artistes peuvent contribuer à la modernisation des espaces et elle commissionne Harry Bertoia, Eero Saarinen, Mies van der Rohe, Isamu Noguchi, George Nakashima et Marcel Breuer pour créer du mobilier. Elle se met elle-même à dessiner des modèles pour “remplir les pages du catalogue Knoll”, dit-elle.
L’attention qu’elle porte aux détails, son sens des proportions et son goût pour l’esthétique moderne feront de ses créations des icônes du design du XXème siècle en raison de leur design intemporel.
En 1946, Hans Knoll et Florence Schust se marient et elle devient partenaire à part entière de la Société Knoll. Ensemble, ils fondent alors Knoll Associates.
En 1947, Florence Knoll lance KnollTextiles, un programme de textiles pour combler un vide dans le marché du tissu d’ameublement.
Elle travaille avec le photographe et graphiste suisse Herbert Matter pour le showroom Knoll de Madison Avenue et imagine un mur textile sous forme de grille-nuancier de couleurs, qui deviendra le modèle de présentation de la ligne de KnollTextiles dans tous les showrooms Knoll.
Avec Herbert Matter, la compagnie développe une identité visuelle très reconnaissable, le logo et les campagnes publicitaires deviennent des modèles graphiques pour l’époque et l’influence de Florence sur la nécessité de cohérence globale en matière de design se révèle incontestable.
Cependant en 1955, sa vie est secouée par une seconde tragédie, son mari Hans Knoll périt dans un accident de voiture à Cuba. Florence est nommée en urgence présidence de la compagnie jusqu’en 1960, date à laquelle elle se recentre uniquement sur la direction du design et du développement marketing.
En 1957, Florence Knoll se remarie avec le banquier Harry Hood Bassett, la compagnie est vendue à Art Metal Construction Company en 1959 et elle se retire de Knoll en 1965, tout en continuant sporadiquement de collaborer avec eux pour des expositions en lien avec son propre travail de designer de mobilier et d’intérieurs.
En 2002, elle reçoit la Médaille nationale des Arts, plus haute distinction dans le milieu des arts aux Etats-Unis.
Pour célébrer les 100 ans de cette femme visionnaire, Knoll a réédité plusieurs des meubles qu’elle a signés.
Florence Knoll-Bassett disparait le 25 janvier 2019, à l’âge de 101 ans …
(Sources © Archives Knoll)